Panorama des acteurs du véhicule autonome

Par Benjamin BRUNEAU - Stanislas MINOT - Charles AMBROSIO - Mehdi JOUINI

28/06/2021


« Dans le futur, je pense que l'on pourra en arriver à interdire la conduite automobile sous prétexte que c'est une activité trop dangereuse. On n'autorisera plus une personne humaine à conduire une machine de deux tonnes potentiellement létale. »

Elon MUSK, 2015

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Cette déclaration, visionnaire pour les uns, fantaisiste pour les autres, illustre le potentiel des véhicules autonomes à mobiliser les acteurs du marché.

En effet, les enjeux liés à la commercialisation du véhicule autonome apparaissent très importants. Tout d’abord en termes de réduction de la sinistralité car près de 90% des accidents de voitures ont pour origine un facteur humain. Ensuite, le véhicule autonome peut répondre aux enjeux sociaux et environnementaux actuels grâce à l’électrique et aux nouvelles pratiques de mobilité humaine développant la “gestion intensive” du parc automobile (co-voiturage, autopartage). Enfin, une myriade d’acteurs se sont lancés dans l’accompagnement de ce mouvement d’automatisation des véhicules créant ainsi des expérimentations diverses. En voici un bref état des lieux :


Les constructeurs 

Les marques de constructeurs réalisent des tests de fiabilités pour tester l’efficacité des véhicules ainsi que sur l’intelligence artificielle. Aux Etats-Unis près de 27 entreprises ont demandé un permis pour réaliser des tests pour leurs véhicules autonomes. Dans cette course à l’innovation, Tesla  et Volvo font office de précurseurs, néanmoins le constructeur Français Renault poursuit sa R&D autour de la technologie Callie sur son modèle ZOE électrique, permettant ainsi d’éviter des obstacles avec plus de facilité. Le 5 mars 2021 Honda a commercialisé la première voiture au monde dotée d’un système autonome de niveau 3 qui permet de déléguer entièrement la conduite au système embarqué dans certaines situations. Le système a été testé suite à la simulation de plus de 10 millions de situations pouvant être rencontrées par un conducteur et a également parcouru 1,3 million de kilomètres sur autoroute lors de tests en conditions réelles.

 

Les équipementiers

En France, l’équipementier Valeo place l’innovation au cœur de sa stratégie. En 2019 plus de 2 milliards d’euros et 1000 brevets ont été déposés ce qui démontre cette volonté. Dernièrement un Range Rover autonome équipé de la technologie Valeo a été testé dans Paris. Le modèle Drive4U dispose de la technologie mise au point par Valeo (radars, systèmes ultra-sons, lasers...). Ces équipements sont déjà fabriqués en série, et de l’intelligence artificielle a été incorporée. L’objectif est de tester l’ensemble des cas de figure qui peuvent exister dans un milieu urbain. En janvier 2020, Valeo a présenté un autre véhicule, le eDeliver4U durant le salon du CES 2020, il s’agit d’un véhicule de livraison à la fois électrique et autonome. Ce qui démontre l’objectif de Valeo de démocratiser cette technologie de pointe.

 

 Les acteurs du numérique

Le secteur de la voiture autonome attire également les entreprises du numérique car elles y voient un marché lucratif. Par exemple, la marque Nvidia, une entreprise connue pour ses cartes graphiques dernière génération, a annoncé en janvier 2018 un partenariat avec Uber et Volkswagen sur les programmes d’intelligence artificielle. Les entreprises de l’automobile pour réussir leur pari de rendre la voiture autonome font régulièrement appel à des entreprises du numérique et de la technologie. Il en va de même pour les GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft) qui investissent des milliards de dollars sur cette technologie. Google fait office de leader grâce à sa filiale Waymo car ils disposent d’une grande expérience dans le domaine du numérique et de la cartographie. Waymo développe à la fois un véhicule la « Google Car », et installe des logiciels de conduite autonome sur les véhicules d’autres constructeurs. Des partenariats ont été mis en place avec Fiat, Jaguar, Land Rover, Renault-Nissan-Mitsubishi ou encore Volvo. Pour son service de transports de marchandises autonomes, Waymo s’est associé avec des spécialistes de la grande distribution (Walmart) et de la logistique (UPS). Un géant comme Amazon voit quant à lui une opportunité d’automatiser la livraison de ses produits.

 

Les Etats

A l’échelle internationale, « une étude du cabinet The Brooklyn Institution estime à 80 milliards de dollars les investissements en faveur du véhicule autonome entre 2015 et 2017, essentiellement en R&D ». Aujourd’hui la majeure partie des investissements est faite par les acteurs privés. Cependant, il ne faut pas oublier le coût de déploiement des infrastructures nécessaires à la circulation des véhicules autonomes (marquage au sol, panneaux de signalisation, équipement numérique, aménagement de voies séparées, etc.) cela constituera une forte dépense qui devrait incomber principalement aux États et aux collectivités. Pour un Etat, l’enjeu est double, renforcer ses positions économiques car le marché du véhicule autonome représentera des millions d’euros de bénéfice pour tous les acteurs, c’est aussi l’occasion de redorer et mettre en avant certain constructeurs nationaux.

 

La France a pour objectif d’être au premier plan des pays européen dans le développement des véhicules autonomes. En décembre 2020, la stratégie de développement a été présentée lors du Comité ministériel du développement et de l’innovation des transports afin de détailler les actions prévues au niveau national. La France a d’ores et déjà lancé un programme national en 2019 à hauteur de 42 millions d’euros. « La stratégie 2020 prévoit d'intensifier les travaux de validation de sécurité (supervision, opération à distance, connectivité). Elle met également en avant le souhait de mieux accompagner les territoires dans l’appropriation des potentialités de la mobilité automatisée. »[1]

 

Les assureurs

En 2019, le constructeur Tesla a choisi de revêtir un double rôle, constructeur et assureur. Tesla propose une assurance à destination des détenteurs de véhicules de la marque. Les assureurs traditionnels sont eux plus prudents, « l’impossibilité d’utiliser des véhicules autonomes en dehors d’expérimentations sur la voie publique empêche pour le moment les assureurs de prévoir des garanties spécifiques qui leur seraient destinées. »[2]. Les assureurs sont actuellement en pleine réflexion à ce sujet. Les principaux freins sont la tarification de ce nouveau risque et la responsabilité en cas de sinistre (conducteur, constructeur, fabricant, concepteur..).

 

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Prochainement nous explorerons la thématique des niveaux d’autonomie des véhicules autonomes.

 

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SOURCES

[1] https://www.entreprises.gouv.fr/fr/actualites/industrie/politique-industrielle/developpement-des-vehicules-autonomes-strategie

[2] https://reassurez-moi.fr/guide/assurance-auto/voiture-autonome